Perfect days
Avec un
petit appareil photographique. A l’heure du déjeuner. Quelques branches d’arbres
qui filtrent la lumière.
Au moment du
réveil, quand il est l’heure de replier le futon. Afin de ranger une pièce
quasiment vide. Sauf quelques livres épars, ressources d’imaginaires lointains.
Dans la cour
de l’immeuble. Le temps de glisser une pièce dans le distributeur de boissons.
Et de prendre un nouveau départ pour vivre intensément une journée parfaite.
Une somme de
gestes. Toujours les mêmes. Rassurants.
Au volant d’une voiture. Au sein d’une circulation fluide. En écoutant la musique d’une cassette audio prélevée dans un stock qui semble inépuisable.
Une collection venue des jours moins parfaits de la jeunesse ? Du temps des jours sans gestes dans un environnement trop riche. Confort rejeté.
Jours de
semaine. Brosses, chiffons, éponges, balais. Dans la perfection de toilettes publiques
dont la transparence se masque pour le respect de l’intimité.
Perfection
de la technique.
Tout en douceur.
Dans un quasi silence. Public / Privé. Respect de chacun vis-à-vis de chacun.
Pureté de l’eau des bains publics. Instants parfaits de douceur. Légère buée sur les miroirs. Comme la légèreté de la brume sur les rivières.
Le temps s’envole.
Existe-t-il ?
Interrompu
parfois. Par quelques passants ou collègues importuns. Intrusifs.
Insupportables
récits des autres qui s’approprient de manière scandaleuse un rythme intérieur
cultivé avec précaution.
Dehors. Hors
champ. Inutiles étrangers qui troublent scandaleusement l’ordre immuable.
Promenade du
dimanche. Table de bar. Verre d’eau glacée. Lente glissade à l’air libre sur
les autoroutes intérieures. Liberté et vacuité des journées sans travail.
La vie s’apprivoise.
La vie se taille comme un bonsaï. Les jours ressemblent à une collection de
petits arbres, eux aussi apprivoisés.
Il y a eu un avant. Un avant rempli de temps gâché par une famille entr’aperçue.
Il y aura un
après, suspendu aux yeux d’une enfant émerveillée.
Prête à inaugurer
à son tour une vie parfaite. En héritage.
Chaque geste
compte.
Chaque
végétal compte.
Il s’agit de
l’équilibre du monde.
Loin de la
vaine agitation.
Loin des rumeurs
et des conflits.
Perfection d’une
vitre propre et d’un lavabo étincelant.
Wim Wenders
fait partie de mon héritage. Je le sais. Je n’ai pas besoin de me remémorer les
titres des films que tous les pays du monde ont inscrit dans un palmarès mérité.
Je ne veux garder
que deux souvenirs.
Le premier : dans une
petite salle de la Fondation Beyeler à Bâle. La mise en relief, au sens propre,
des tableaux muets d’Edward Hopper, quelques jours avant l’enfermement de la
pandémie.
D’autres
vies parfaites, mystérieuses. Aperçues de loin. Dans une lumière sans âge. Deux
ou trois choses que l’on connaît du peintre. A peine plus d’information sur ceux
qui vivent dans les vitrines en déshérence, dans les restaurants désertés ou à
la porte des maisons.
Le second: dans la
salle de projection du Centre de Création Industrielle du Centre Pompidou. Le
cinéaste qui introduit son propos.
A nouveau
des portraits : ceux des « Carnets de notes sur vêtement et
villes ».
Je redécouvre
son regard sur le Japon.
Déjà. Encore !
Et à Paris. A nouveau.
Après Berlin
et les anges déchus.
Je me
souviens de son regard sur un créateur japonais que j’aime et dont j’ai suivi
plusieurs fois les défilés. Avec des professionnels, devant le catwalk de la
Cour du Louvre. Dans la plus grande intimité d’un show-room, à proximité du
Centre Pompidou.
Justement !
Joshi Yamamoto. Parfait de ligne et d’à-propos.
Et tout se
met en place de manière précise.
Perfect Days. Le calme et la
paix revenus.
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