De l'autre côté du désir. Wim Werders : "C'est tout et c'est rien". Ou l'inverse.

 


Je croyais me souvenir de "Paris Texas". Je l'ai revu sur un écran de télévision, avec une émotion intacte.

Je me souvenais de "Perfect days", bien plus récent, mais inscrit dans la lenteur d'un balancement quotidien du temps.

Le premier est venu remonter à la surface de la mémoire, comme une bulle pour m'aider à traverser l'espace de tant de voyages, dont j'ai laissé les traces derrière moi. Un symbole de toutes les photographies et de quelques textes qui restent fixés sur les lignes d'horizon de mes dernières missions professionnelles

Il ne me restait plus que de faire ressurgir des images du Centre Pompidou pour que la présence de Wim Wenders ressurgisse dans cette salle de projection du Centre de création industrielle où il présentait aux Parisiens "Carnets de notes sur vêtements et villes", pour que le cercle de quelques instantanés de ma propre vie tente de recouvrir les visages angéliques traversant Berlin.




 Ce ne sont que des souvenirs, ce ne sont que des instants. 

Ce n'est rien qu'une surface imagée, une surface animée. 

Mais, en effet, c'est tout !

Un tout dont chaque composante filmée vient s'agréger aux autres. 

Que la caméra suive des voitures sur des autoroutes ou s'étire dans les pas d'une route désertique. 

Que la chair soit située au plus près avec ses lèvres rouges ou dans la protection d'une vitre sans tain.

Que la présence, soit une absence en noir et blanc. 

Protection ou simple surveillance des anges ? 

Que les personnages soient submergés par le furieux désir de changer de destin et de revenir à la couleur.

La couleur de la chair !



   

La caméra de Wim Wenders est instable et pourtant, elle sait en permanence où elle doit se placer.

Au plus près. Dans l'intimité des êtres. 

Au plus près de leurs gestes. 

Dans l'équilibre de l'acrobate.

Avec justesse et dans le risque de tomber. 

Comme au cirque ! Mais en faisant rire le spectateur. En le mystifiant, mais en même temps, en le mythifiant.

Avec la justesse de l'entre-deux.

Et en  laissant la corde se tendre sans le lien inquiet qui va transformer le risque de la chute dans un risque de la rencontre.

On dit bien : "Tomber amoureux" !




Sa  caméra n'écrit pas. Les dialogues, les phrases échangées, ne sont que des poussières d'humains, soulevées ou balayées par un coup d'aile, celle du protecteur ou du spectateur invisible, mais inscrit dans l'éternité.

Des points de vue. 

Du haut d'un monument. ou sur le toit d'une automobile. 

En survol au-dessus de la ville, ou dans la prison de la vitrine d'un restaurant qui ressemble à un tableau d'Edward Hopper.

Et Peter Falk, nimbé de son prestige d'inspecteur ahuri et pourtant toujours vainqueur, semble déjà savoir, pris dans un film en gestation, enfermé à l'intérieur d'un autre film gigogne, prisonnier de la présence des anges qu'il perçoit, qu'il est seul à percevoir, que le MUR de Berlin va tomber.

Le mur de nos illusions ? 

Le mur de nos fantasmes ? 

Le mur de nos désirs.

Toutes les barrières qu'il faut franchir. Pour vivre. 

Tout simplement ! 

  



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